Chronique

Dejan Terzić Axiom

Silent Dancer

Dejan Terzić (dms), Chris Speed (ts), Matt Penmann (b), Bojan Zulfikarpašić (p, Rhodes)

Label / Distribution : CamJazz/Harmonia Mundi

Axiom est, pour Dejan Terzić, un quartet particulier. Le batteur d’origine serbe, installé en Allemagne depuis l’enfance, mène avec Melanoia, son quartet berlinois, un travail sur le temps et sa dissipation, une musique plus abstraite, qui se mêle volontiers à des créateurs contemporains tels que le quatuor Ixi, notamment pour jouer la musique de Luzia von Wyl. Axiom est plus international, avec le contrebassiste Matt Penman (entendu notamment avec Joris Roelofs) et le saxophoniste Chris Speed, deux musiciens américains coutumiers de la vieille Europe, pour une musique plus directe, où la musicalité du batteur laisse place à une mécanique plus rodée, voire assez implacable. En témoigne « Typewriter » où l’ostinato de Bojan Zulfikarpašić, dernier angle d’un carré tranchant, vient donner à Terzić l’occasion de développer une rythmique pleine de tension que Chris Speed attise.

Déjà remarqué en 2016 avec Prometheus, le quartet est des plus soudés. « Synchronicity », par exemple, développe une musique répétitive d’où le saxophone de Speed s’échappe, comme pour donner davantage de relief et d’espace, renforcé par la contrebasse impeccable de Penman. Le contrebassiste est sans doute le plus discret de ce Silent Dancer, mais la plupart des tâches souterraines lui incombent, notamment lorsque Terzić s’affaire à la grande histoire d’Axiom : la relation mi-télépathique mi-antagoniste qu’il entretient avec Bojan Z. Cela tient de l’écheveau bousculé, nébuleux et entremêlé, comme dans « Synchronicity » à « Outcry » où le Rhodes offre des riffs rugueux autour desquels le batteur tourne rageusement en compagnie de son saxophoniste.

Lorsque Bojan Z s’électrise, le disque prend une autre tournure. Faussement minimaliste, le propos explose en de multiples fragments que Chris Speed tente de contenir. Les climats se succèdent, comme des couches qui se superposeraient partiellement, régulé par une batterie très créative et toujours à propos, même dans son économie de gestes. Ainsi dans le doux « Chimaera » qui clôt l’album, piano et batterie retrouvent une certaine concorde, pas si éloignée de ce que Terzić propose par ailleurs dans d’autres orchestres. Une belle maîtrise.