Chronique

Ashley Henry

Beautiful Vinyl Hunter

Ashley Henry, p. & invité.e.s

Label / Distribution : Sony music

Ne vous laissez pas distraire par la palette d’invités aux noms excitants - Makaya McCraven, Jaimie Branch, Judi Jackson, Keyon Harrold, Binker & Moses, Theo Croker, ou encore Sparkz (le MC de The Mouse Outfit) - le patron, c’est lui, Ashley Henry, qui signe avec ce premier album sur une major, une somme qui embrasse large la Black music.

Cette œuvre ambitieuse qu’il a produite seul le positionne durablement, à 28 ans, sur la scène internationale comme un pianiste, compositeur, arrangeur, producteur, à l’aise dans les collaborations transatlantiques.

C’est qu’après deux premiers EP depuis 2016 (5ive, Easter), un talent d’accompagnateur – on se souvient de l’avoir vu aux côtés de Zara Mc Farlane à la Petite Halle à Paris en 2017 – Ashley Henry a saisi l’opportunité d’une tournée mondiale auprès de Christine and the Queens pour avoir l’œil à tout et s’exercer à aller plus loin que son rôle de pianiste.

Beautiful Vinyl Hunter, son premier album donc, rassemble les influences qui ont structuré le rapport à la musique de cet enfant de la diaspora jamaïcaine du South London : jazz, hip-hop, broken-beat. Le titre lui-même reflète son rapport affectif aux disques.

« Ma musique est le reflet de la personne que je suis - Londres dans toute sa splendeur et sa mixité - mais aussi l’immigrant en moi ayant des racines musicales qui remontent aux années 1600. C’est pourquoi ma musique traverse les genres et les générations. »

Si le projet est pensé comme un tout, les quinze pistes ont été individuellement enregistrées avec des invités pendant ses tournées avec d’autres artistes.

Ashley Henry a conçu l’album seul mais pour autant il laisse la part belle aux invités dont il s‘entoure avec notamment une mise en avant de la voix et de l’orchestration soyeuse : la voix de Judi Jackson sur deux titres – Star Child et Lullaby (Rise & Shine) - celle du chanteur Milton Suggs sur le luxuriant I Still Believe – ou encore la voix du poète Joshua Idehen (que l’on pouvait entendre sur Your Queen Is A Reptile de Sons Of Kemet), qui slamme ici sur le thème de l’identité et de la discrimination raciale sur le titre broken beat COLORS.

Dans le détail du line-up, on trouve d’abord des musiciens de la scène jazz britannique : Dan Casimir (le bassiste de Nubya Garcia), Eddie Hick (le percussionniste de Sons Of Kemet), Dylan Jones (le trompettiste d’Ezra Collective), Ferg Ireland (le bassiste de Ruby Rushton), Artie Zaitz (le guitariste de Maisha), le saxophoniste Binker Golding et le batteur Moses Boyd, ou encore Ben Marc aka Neil Charles. Ce contrebassiste proche de Shabaka Hutchings, passé par l’organisation britannique Tomorrow’s Warrior, est invité sur le morceau broken beat final THE MIGHTY.

Quant aux collaborations transatlantiques, outre les trompettistes Keyon Harrold sur le titre hip-hop Between the Lines, ainsi que Theo Croker, Ashley Henry intègre à son album le fruit d’une session de 2017 CHICAGO x LONDON au Total Refreshment Centre.

La pièce s’intitule Dark Honey (4TheStorm), elle réunit pour l’équipe britannique Ashley Henry au Rhodes, le trompettiste James Copus et Dan Casimir à la basse, et pour la scène issue de Chicago le tandem Makaya McCraven et Jaimie Branch.

Un menu copieux pour un album qui fera date.