John Scofield

On évoque beaucoup en ce moment – à juste titre d’ailleurs – le Grateful Dead. Après l’hommage d’une grande justesse rendu par Dead Jazz, c’est au tour de John Scofield d’y aller de son clin d’œil en donnant à son nouveau disque chez ECM le titre d’une des compositions phares [1] du groupe de San Francisco. Mais contrairement aux frères Belmondo et leurs partenaires, le guitariste ne consacre qu’un seul titre à cette formation aujourd’hui entrée dans la légende du rock américain, parmi d’autres reprises enluminées (Bob Dylan, Neil Young, Leonard Bernstein, Miles Davis…), plusieurs standards (« Stairway To The Stars », « Ray’s Idea ») et une nouvelle fournée de compositions originales. De quoi alimenter un copieux double CD et susciter un ravissement bienvenu, tant la musique ici jouée s’écoule dans une fluidité faussement tranquille que nos temps troublés rendent nécessaire.

On avait laissé Scofield en solitaire, totalement épanoui dans un répertoire également mixte, entre compositions personnelles et reprises. Le voici de retour avec son trio (Vicente Archer à la contrebasse et Bill Stewart à la batterie) dont l’équilibre est exemplaire de bout en bout. Comment pourrait-on mieux définir l’esprit du jazz qu’avec cette formation réduite à l’essentiel, qui fait montre d’un sens parfait de la conversation, celle-ci étant nourrie par une verve constamment communicative, et qui selon ses dires peut « à tout instant aller dans n’importe quelle direction » ? John Scofield, on le sait très bien, n’a plus rien à prouver : au sommet de son art, virtuose et humble à la fois, capable de mobiliser toutes les sources musicales qui l’habitent, le guitariste semble jubiler dans chaque note jouée, porté par ce qui ressemble fort à de la gourmandise. Uncle John’s Band est une déclaration d’amour non seulement à toutes les musiques qu’il aime, mais aussi et surtout à la vie.