Jorrit Dijkstra
PorchBone
Jorrit Dijkstra (as, liricon, elec), Jeb Bishop, Michael Prentky (tb), Bill Lowe (btb), Nate McBride (b), Eric Rosenthal (dm).
Label / Distribution : Driff Records
Paru dans le courant de l’été sur le label Driff Records qui publie inlassablement un travail opiniâtre et de qualité, le Porchbone du multianchiste Jorrit Dijkstra marque à la fois un retour et une ouverture. Un retour, car le noyau de l’orchestre est bien entendu le trio, la formation de prédilection du musicien de Boston originaire des Pays-Bas. On l’avait notamment entendu avec l’impeccable CutOut en compagnie de son vieil ami Pandelis Karayorgis [1], on retrouve donc ici les fidèles Nate McBride à la basse (électrique et contrebasse) et Eric Rosenthal à la batterie. À l’écoute de « N°5 Into N°4 », où McBride joue avec l’électricité de son instrument pendant que Dijkstra installe un climat perclus d’électronique au liricon, on perçoit que ce trio est la palpitation de l’orchestre.
Ce qui amène à l’ouverture que propose cette Trombatics Suite. Porchbone est un sextet et, selon la logique de Dijkstra, il ne peut se constituer que d’un double trio. Ce sont donc trois trombonistes qui forment le second trio : si la présence de Jeb Bishop, vieux compagnon de route de Driff Records et boutefeu remarqué, n’est pas à proprement parler une surprise, celle, au trombone basse, du vétéran Bill Lowe n’est pas plus étonnante. On a entendu le musicien chez Taylor Ho Bynum ou chez Threadgill, et il fait partie de ce cercle bostonien dans lequel évolue Dijkstra, McBride et Rosenthal. Pour clore le trio de coulisses, on découvre le tromboniste Michael Prentky qu’on avait déjà remarqué dans la jeune garde new-yorkaise de Seajun Kwon.
La musique de Porchbone est à la fois instinctive et très sophistiquée, l’adjonction des deux trios permettant des réactions en étages, offrant une vraie profondeur ; et alors que « One » décrit un chaos vibrionnant pleinement hérité du travail de Muhal Richard Abrams et d’une partie de l’AACM, « Two » propose au contraire une lecture plus traditionnelle où les trombones sont les garants d’un mouvement permanent dans lequel la base rythmique de Jorrit Dijkstra se sent en liberté. Il y a une grande élégance dans cette musique très écrite du saxophoniste, qui nous offre un nouvel avatar de la vigueur de ses rencontres.

