Chronique

Orca Noise Unit

A Beginner’s Guide to Diving & Flying

Jozef Dumoulin (p, cla, perc, fx), Sylvaine Hélary (fl, perc), Antonin-Tri Hoang (cl, bcl, as, perc), Bruno Chevillon (b, perc), Toma Gouband (perc)

Label / Distribution : Yolk Records

Après avoir cherché dans les sonorités électriques du Rhodes quelques fées vertes insaisissables mais fascinantes, Jozef Dumoulin retourne, avec cet Orca Noise Unit, à des sonorités plus brutes. Celle du piano, dont son approche est finalement peu différente des claviers électriques, favorisant l’intensité à la quantité. On le constate sur « Second Room » qui cherche dans ses basses et dans ses cordes la force de la parcimonie. Pour l’accompagner sur ce terrain aux reliefs neufs mais au chemin familier, on ne s’étonne guère de retrouver la flûte de Sylvaine Hélary. De « The Garden » où elle s’harmonise avec le souffle d’Antonin-Tri Hoang à « Little Flower Expanding » où elle saute de pierres en pierres sur le set minéral du percussionniste Toma Gouband, elle est la véritable boussole dans ce périple, montrant parfois le chemin des écoliers à un quintet chevronné où Bruno Chevillon apporte ce qu’il faut de rudesse.

A Beginner’s Guide to Diving And Flying pourrait être perçu comme le grimoire qui mène vers le monde à l’envers, où l’on plonge pour voler : les percussions, utilisées par l’ensemble du groupe, sont très musicales et c’est le souffle et le frottement des cordes qui a souvent le rôle de rythmique. Tout est sensible, fluctuant et pour tout dire impermanent, à l’image de « Acknowledgements » qui commence dans un clapotis léger où chaque ridule de son a son importance, pour terminer dans quelque chose de plus brut et collectif, sans pour autant qu’il y ait le sentiment d’un orage. Nous sommes toujours dans l’univers de Jozef Dumoulin, qui sonde en quelque sorte son côté sombre : l’avantage est laissé à l’imperceptible, au frôlement, à une douceur fiévreuse telle que nous l’avions entendue avec le Red Hill Orchestra, déjà édité par Yolk.

Née et enregistrée au Petit Faucheux de Tours à l’occasion d’une résidence, la musique du Orca Noise Unit n’a de Noise que le nom, ou plutôt il convient de l’interpréter comme une hypersensibilité au son, une capacité à en décoder tous les signes et à en composer l’histoire. Ainsi « As Above, So Below », comme son siamois « As Below, So Above », est une lente pérégrination où chaque son, de la clarinette basse à la flûte, de la contrebasse aux accords aigrelets du piano viennent proposer des bifurcations. Entièrement consacré à l’improvisation, ce premier album de l’Orca Noise Unit livre sur la durée le secret de son voyage : s’il faut plonger et voler, c’est que la destination est spatiale, ou pour le moins spectrale. En orbite, sans doute, non loin de la galaxie Octurn ou tout ces endroits où il fait bon rêver.