Chronique

RP3 - Rémi Panossian Trio

Happy Birthdé

Rémi Panossian (p), Maxime Delporte (b), Frédéric Petitprez (dms).

On pouvait compter sur ces trois-là pour fêter dignement leur anniversaire. Non qu’ils aient forcément choisi le douzième pour célébrer une amitié qui ruisselle – pour une fois que la théorie du ruissellement est avérée, n’hésitons pas à la diffuser – depuis le premier album du groupe en 2010. Dans un entretien accordé à Citizen Jazz au début de l’année 2020, Rémi Panossian annonçait un live qui devait être enregistré à Séoul, constitué d’une sélection de compositions issues des cinq disques enregistrés jusque-là par RP3 : Add Fiction, BBANG, RP3, Morning Smile, In Odd We Trust. Autant de disques dont nous avions souligné année après année les qualités, la force souriante et les influences heureuses (Bad Plus, EST…) tout en mettant en avant leur singularité et leur santé rayonnante. Mais l’imprévu vous guette parfois au tournant : Covid, confinements… et voilà la machine à spectacles encalminée dans la rade d’une pandémie à n’en plus finir. Il aura fallu réviser un peu le projet sans pour autant y renoncer et c’est à la fin de 2020 que le trio a joué son « best of » à la maison, au Bikini de Toulouse, un lieu ayant connu une deuxième vie après sa destruction en septembre 2001 suite à l’explosion de l’usine AZF.

Happy Birthdé – ce néologisme franco-anglais signifie-t-il que RP3 accorde une chance au hasard, celui de la vie sur un lancer de dés ? – est donc, comme envisagé il y a deux ans, un florilège live, un condensé de toutes les énergies qui poussent ce groupe vers une ivresse mélodique et rythmique que les années ne sauraient démentir. Le terme d’amitié employé un peu plus haut n’est pas galvaudé quand on évoque la vie de RP3, tant s’en faut : Rémi Panossian, Maxime Delporte et Frédéric Petitprez parlent exactement la même langue, ils pensent et vibrent ensemble, ils ont chevillé au corps un amour commun des voyages et des rencontres aux quatre coins du monde. On pourrait ajouter leur prédilection pour un humour bon enfant, qui transpire ici dans le visuel du disque au kitsch savamment élaboré, jusqu’aux cadres parfois accrochés de travers aux murs. Ici, à Citizen Jazz, nous les avions repérés dès le début et bien noté ce qui faisait d’emblée la marque de fabrique de leur musique : « On entend chez eux une joie de jouer ensemble (un vrai trio) une musique à la fois romanesque, imaginative et lyrique autant qu’énergique et volontariste », écrivait le regretté Jacques Chesnel au moment de la sortie de Add Fiction. Autrement dit, et comme nous le rappelait en son temps un certain Nicolas Boileau : ce qui se conçoit bien s’énonce clairement. Oui, parfaitement conçu, d’une limpidité mélodique poussée à fond par trois énergies de nature fusionnelle, le répertoire de RP3 est ici d’une absolue clarté. On ne pouvait imaginer meilleure porte d’entrée au monde qu’ont su façonner trois musiciens dont l’enthousiasme semble inaltérable. Leur jazz est pétillant, gonflé à bloc et prêt à de nouvelles aventures.

Alors bon anniversaire et vivement la suite !