Chronique

Samuel Ber

Maps & Synecdoches / Between

Samuel Ber (dm) + Tony Malaby (ts), Jozef Dumoulin (Fender Rhodes) / Guillaume Orti (as), Sylvain Debaisieux (st), Bo Ven Der Werf (bs), Bram de Looze (p)

Label / Distribution : Autoproduction

À seulement 22 ans, le batteur belge Samuel Ber est à compter parmi les personnalités précoces. Par ses capacités techniques bien entendu (élève de Teun Verbruggen, Dré Pallemaerts, Eric Thielemans ou encore Stéphane Galland, il a récemment joué au côté de Jean-Jacques Birgé et Antonin-Tri Hoang dans un enregistrement dont nous rendions compte) mais surtout par sa capacité à mener à bien un projet artistique parfaitement mature dont témoignent deux disques récents signés de sa main.

Sur Maps & Synecdoche, il est à la tête d’un trio qui compte en ses rangs le saxophoniste ténor Tony Malaby et le claviériste Jozef Dumoulin. Le grain épais et la puissance de jeu de l’Américain font évidemment merveille et constituent la porte d’entrée la plus immédiate pour cette musique libre qui ne se satisfait pas de la demi-mesure. Malaby laboure en tous sens des gammes qu’il semble réinvestir à chaque nouveau disque et parvient à dérouler une pensée profuse malgré un style désormais connu mais toujours autant apprécié. Collé à sa colonne d’air, le batteur tient une rythmique lourde sauvagement martelée et, dans le même temps, propose des ornements aux cymbales qui apportent un contrepoint métallique et subtil à l’entité qu’il forme avec le saxophoniste.

En contraste à ces ambiances terriennes quoique d’un premier abord discret, les sonorités électroniques de Dumoulin instaurent un climat lunaire qui conduisent le trio vers des régions inexplorées qu’il investit avec le même enthousiasme. Peu à peu, en donnant de l’épaisseur à ses propositions, le claviériste rajoute de la densité à une musique qui n’en manque pourtant pas et repousse encore un peu plus loin son expressivité. La plupart des compositions sont signées Samuel Ber qui joue sur tous les tableaux. Aussi à l’aise dans le sens de la repartie que parfait coloriste si besoin. Le disque prend soin de jalonner les parties en surchauffe de pastilles texturées qui évitent de rester trop étroitement dans une esthétique jazz.

Plus écrite encore, la formation Pentadox s’est initialement constituée en trio en 2015. Aujourd’hui Guillaume Orti tient le saxophone alto, Sylvain Debaisieux le ténor. Complété par le baryton de Bo van der Werf et le piano à Bram de Looze le quintet rassemble des personnalités en quête, depuis de nombreuses années, de nouvelles associations timbrales et de développements contemporains.

Prenant naissance dans le silence qu’il vient froisser avec beaucoup de précaution, le groupe laisse peu à peu entendre une matière musicale constituée de fragments ou de flammèches qui fusent et s’agglomèrent autour d’un même foyer. Auditeur pressé, passe ton tour ! Il faut de la patience. Les états statiques se meuvent peu à peu et jouent avec l’immobile. Sans swing sous-jacent, cette suspension évoque la formation Octurn, les sonorités profondes et décalées de Bo van der Werf n’y étant pas étrangères. Les paroles réparties en sonorités atonales sont cuivrées et lumineuses et, au final, une troupe conquérante se lève dont l’apothéose permet d’apprécier le chemin parcouru. Moins immédiat que le trio, Between de Pentadox affiche l’ambition d’un jeune musicien qui démarre ici son parcours avec une belle intégrité. Nous le suivrons désormais.