Filip, Oswald, Haug
Xanthic Tales
Margaux Oswald (p), Oscar Andreas Haug (tp), Axel Filip (d)
Label / Distribution : Sonic Transmissions
Dans un démarche assez similaire au récent Omawi qui célébrait la pianiste Marta Warelis, soit une alliance sacrée des contraires qui fonde l’entropie même, Xanthic Tales nous offre l’occasion de nous délecter de nouveau de la puissance de Margaux Oswald. On l’avait déjà célébré dans un portrait où ces quelques mots « impermanente, intense et instinctive » pourraient être déclinés à l’infini : dans « Tug of War » [1], face au trompettiste danois Oscar Andreas Haug, elle offre des courses effrénées et de soudains éclats qui maintiennent une forme d’urgence, bien aidée en cela par le batteur argentin Axel Filip qu’on a eu maintes fois l’occasion d’entendre avec Camila Nebbia. L’alliance entre piano et batterie est intense et organique, créant une forme d’équilibre dans le chaos. Les morceaux les plus courts de l’album consacrent ce mouvement : même « Age Old Quest », où la raucité de Haug fait mouche dans une intro presque chambriste, est en réalité un dispositif de tension des plus redoutables.
Oscar Andreas Haug n’est pas à proprement parler une découverte. On l’avait entendu très récemment dans les orchestres d’Amalie Dahl, mais ici le potentiel de son instrument est pleinement utilisé ; si c’est souvent lui qui propose avec douceur un chemin à visiter, il est prompt à le dynamiter lorsque ses compagnons le rejoignent. Dans « Loved One » qui ouvre ces Xanthic Tales, ce sont les cordes frottées du piano d’Oswald et les rythmiques inconstantes de Filip qui vont le mener à un sentier plus escarpé, heurté, prêt à se déliter jusqu’au point de rupture. Il faudra « Beacon » et le temps plus long de « Many A Moon » pour que la trompette impose une forme de sérénité où Oswald fait fleurir des couleurs plus chambristes d’une main droite preste et mesurée.
Bien sûr, cela ne va pas sans éclats. Dans ces temps plus apaisés, ils se font plus sporadiques mais se manifestent tout de même. Les cordes étouffées par la préparation des entrailles du piano peuvent répondre à une batterie devenue sèche qui sait ménager des plages de silence recueilli. Coutumière des duos avec des trompettistes (on pense à Magnetite), Margaux Oswald est absolument au centre d’une discussion collective où sa proximité avec Filip est au cœur d’un disque d’une fluidité extraordinaire. Le disque paru sur le label Sonic Transmission Records est aussi l’occasion de mettre la lumière sur la scène de Copenhague où Haug et Oswald sont installés.