Chronique

Hilde Marie Holsen

Lazuli

Hilde Marie Holsen (tp, elec, fx)

Label / Distribution : Hubro

Les jeunes femmes trompettistes sont depuis quelques années des figures phares de l’Europe du jazz et de la musique improvisée. Après Airelle Besson et Susana Santos Silva, voici donc une nouvelle venue, arrivant tout droit de Norvège comme son label Hubro : Hilde Marie Holsen signe avec Lazuli un disque solo qui marquera les observateurs. Pas seulement parce que la musicienne se lance tête la première dans un exercice difficile. Mais aussi car cette descente en rappel dans une mine de pierres précieuses, entre souffle et électronique, révèle tour à tour une personnalité, un univers et un sens des couleurs et des températures très impressionnants. Ainsi « Eskolaite », minéral rare issu des forêts lapones est l’occasion d’entendre des artefacts électroniques rouler comme de petits débris qui s’effritent d’un son clair et brillant.

Lazuli est court, ramassé, mais il resplendit. Holsen se produit avec Lynn Cassiers en duo, et lorsqu’on entend la lente plainte de la trompette dans « Lapis », force est de constater que cette rencontre est naturelle. Il en est de même avec Bilayer, son duo avec l’électronicien Magnus Bugge. On retrouve dans le travail des sons de ces artistes une même direction, un chemin tortueux et mélancolique où se mélange une sorte de fièvre cotonneuse qui emplit tout et devient même le sujet grâce à des boucles, des déviations et des sons altérées par toutes sortes de variations électroniques.

Dans Lazuli, l’objet ne remplace pas le fond. Jamais, dans les quatre morceaux de l’album, le traitement du son ne l’emporte sur la trompette elle-même, y compris dans le morceau-titre qui dure plus de la moitié de l’album. Certes, le matériau est poli, travaillé, raffiné, mais il ne se gâte pas dans cette approche pop qui a tendance à parfois emporter les suffrages des musiciens nordiques. De bout en bout, Hilde Marie Holsen tient à ses textures qu’elle sait agrémenter de brisures éclatantes comme autant de petites pierres resplendissantes. L’exercice est remarquable de maturité, singulièrement dans la configuration soliste ; il donne envie de l’entendre dans de nombreux contextes, comme ce Silent Fires avec le pianiste Alessandro Sgobbio où elle peut confronter ses idées et garnir son biotope d’essences nouvelles. A suivre, avec un réel enthousiasme.