Chronique

Orchestra Nazionale Della Luna

There’s Still Life on Earth

Manuel Hermia (s, fl, bansurî), Kari Ikonen (p, Moog), Sébastien Boisseau (cb), Teun Verbruggen (dm)

Label / Distribution : BMC Records

Deuxième volet pour l’Orchestra Nazionale Della Luna, trois ans après une production qui avait séduit par son ancrage dans un langage jazzistique bien compris. Prolongé jusqu’aux propositions les plus contemporaines, le sens de l’interaction collective lui conférait une dimension immédiate qui n’empêchait pas une certaine sophistication. La mise en espace de chacune des voix évoquait naturellement le travail de Wayne Shorter tandis que l’humour et la spontanéité des interventions offraient, par ailleurs, un caractère ludique.

On retrouve aujourd’hui dans ce quartet, co-dirigé depuis 2015 par le pianiste finlandais Kari Ikonen et le saxophoniste (et flûtiste et joueur de bansurî) belge Manuel Hermia, ces mêmes caractéristiques qui s’ouvrent plus encore à des territoires variés, réels ou imaginaires. On parcourt ainsi des compositions d’inspiration arabe ou indienne au sein desquelles la flûte vient avec justesse apporter ses couleurs liquides. Ailleurs, ce sont les sonorités déstabilisantes du Moog accolées à un piano léger qui contribuent à dresser des climats hybrides et renouvellent les approches esthétiques.

Tout du long, on assiste à des échanges où le tact et l’habileté de gentlemen diplomates sont la meilleure représentation des intérêts d’une musique ouverte à l’international mais qui reste foncièrement elle-même. A l’affût des directives des leaders, la rythmique s’engouffre immanquablement dans toutes les zones de jeu. Teun Verbruggen, notamment, investit le moindre espace pour l’enrichir sans déstabiliser l’ensemble. La basse sur le fil de Sébastien Boisseau lui sert, il faut dire, à la fois de ligne de démarcation et d’horizon. Dans les ambiances les plus profondes comme les plus anguleuses, le quartet embarque l’auditeur vers les formes jouissives et sensuelles de l’existence.

Ce disque arrive à point nommé. Au moment où une partie du monde sort d’un confinement de plusieurs semaines suite à l’invasion d’un virus criminel, il annonce avec éclat et enthousiasme qu’il y a toujours de la vie sur terre.