Chronique

Oxyd

Oblivious

Alexandre Herer (comp, rhodes), Julien Pontvianne (ts), Olivier Laisney (tp), Matteo Bortone (b), Thibault Perriard (dr).

Label / Distribution : Juste une trace

Difficile de parler d’une musique qui semble à la fois être la synthèse d’une certaine modernité, un vaste champ de défrichage et, en même temps, l’affirmation d’une identité de groupe. Oblivious, enregistré sur le label Juste une trace, est le deuxième album d’Oxyd, dont Alexandre Herer, qui joue du Fender Rhodes, signe toutes les compositions. Pourtant, comme dans nombre de jeunes groupes tels que Radiation 10, RockingChair ou encore Rétroviseur, pas de leader affiché dans le nom du groupe lui-même. Les arrangements sont collectifs, et l’esprit aussi.

Dans une interaction organique omniprésente, on entend aux côtés d’Alexandre Herer le trompettiste Olivier Laisnay (Slugged), le saxophoniste ténor Julien Pontvianne (Khoom), et la rythmique infaillible formée par le bassiste Matteo Bortone et le batteur Thibault Perriard. Leur premier album, autoproduit, porte le même nom que le collectif parisien dont ils sont membres : Onze heures onze. Contre tout esprit de chapelle, celui-ci revendique des influences hétéroclites. Oxyd est traversé par l’héritage « steve-colemanien » et ses lectures européennes (Thôt, Octurn), mais aussi par les pièces à la fois easy listening et complexes de Radiohead ou l’énergie de Sonic Youth, en passant par les sonorités de la musique contemporaine.

Le vocabulaire éclaté et atmosphérique des longues improvisations qui flirtent avec le free jazz et les musiques expérimentales (« Doug », « Interlude2 ») est porté par des échafaudages cycliques formant une structure globale latente, de sorte que l’auditeur jamais ne se perd. Les jeux d’emboîtement et de superpositions, s’ils sont complexes, n’alourdissent pas la musique. Enfin, une énergie rock qui flirte aussi avec Jim Black donne une empreinte mélodique à l’ensemble (« Très clair », « Oblivious », « Sidérodrome »). Le Rhodes n’y est pas pour rien : avec la même douceur qu’un vibraphone, il apporte une belle épaisseur lyrique (« Ankh »). Une histoire nous est contée.