Chronique

Rollet / Foussat / Rollet

Entrée des Puys de Grêle

Quentin Rollet (as, ss, fx), Jean-Marc Foussat (synth, elec, fx), Christian Rollet (dms)

Label / Distribution : FOU Records

Les Puys de Grêle n’existent pas, a priori ; cela paraît relever de l’image, de la métaphore poétique : l’Auvergne en début d’automne quand elle se lave de la chaleur. Les boyaux d’une mine profonde où l’on extrairait on ne sait quel minerai précieux de la montagne… C’est l’ambiance qui règne dans ce trio inédit proposé en coproduction par le label Bisou Records de Quentin Rollet et Fou Records. Ce label nous avait réjouis récemment avec la parution d’un coffret consacré au Workshop de Lyon ; il se recentre cette fois sur les prouesses du barbu saxophoniste et son goût pour une électronique qui colle à la peau comme des vêtements essorés par la pluie. Rien de mieux, dès lors, que d’inviterau sommet des Puys Jean-Marc Foussat qui, dans « Entrée par la fenêtre », fait voleter toutes sortes de voix caverneuses et pourtant insaisissables, comme si en plus d’être l’objet d’intempéries dantesques, il y avait quelques passages hantés.

Mais l’ARFI n’est pas loin non plus. Car si l’alto et le sopranino de Quentin chargent à pleins poumons l’espace perclus de champs électriques, la batterie de Christian Rollet offre toutes sortes de fracas, de reliefs et d’anfractuosités où les climats peuvent être différents. C’est tout l’enjeu de « Au fond des Puys » qui commence à la surface, tiré vers les profondeurs par des sons synthétiques vintage qu’érodent les sonnailles du batteur et les coups de tonnerre sur la caisse claire. Il y a des gifles et des griffes, des bousculades entre claviers et anches mais ce n’est jamais agressif ; comme un phénomène naturel, personne ne semble avoir aucune prise sur ce qui se passe, sur le ciel qui se vidange où il veut et sur le terrain qui s’affaisse à mesure qu’il se détrempe. C’est à peine si, parfois, se forme quelque cavité où l’atmosphère est plus clémente et où Foussat reprend le dessus dans son éther habituel.

De mémoire, c’est la première fois que les Rollet père et fils se retrouvent sur disque. Entre l’un des fondateurs de l’ARFI, qui nous a offert il y a peu un magnifique solo et son fils qui est l’une des figures de la musique des années 90 aux côtés de Noël Akchoté, la complicité est forcément immédiate, et le point de fusion arrive vite, quoique par des chemins fort dissemblables. Foussat au milieu ne fait pas que tenir la chandelle ; au pire, il l’embrase pour notre plus grand plaisir. L’Entrée des Puys de Grêle est comme ces lieux éphémères qui s’ouvrent au gré des marées ou des mouvements telluriques. Il faut en profiter dans l’instant, car nul ne sait quand l’occasion se représentera.