

BassDrumBone
Afternoon
Mark Helias (b), Gerry Hemingway (dm), Ray Anderson (tb).
Label / Distribution : Auricle Records
Alors qu’en 1979 paraissait le premier album du trio BassDrumBone [1], on peut désormais dire que cet attelage réjouissant et surprenant aura marqué de son empreinte le jazz et les musiques connexes depuis près de 50 ans. Pourquoi surprenant ? L’instrumentarium n’est pas commun, même si des musiciens comme Jeb Bishop s’en sont saisis à sa suite. BassDrumBone revient depuis l’orée des années 90 au moment des anniversaires, comme une cousinade lointaine. Depuis Wooferlo, les disques agissent comme des points d’étape dans les discographies respectives des protagonistes, mais font toujours prospérer une joie intacte de jouer ensemble, à l’instar d’« Afternoon Begins », le premier morceau d’un album roboratif.
On est heureux de retrouver intacte la ligne claire de la contrebasse de Mark Helias, toujours aussi précis dans un jeu où l’autorité naît de la simplicité ; sa relation avec le tromboniste Ray Anderson est ancienne et fructueuse : le tromboniste joue lui aussi très simple, avec un jeu puissant qui s’appuie beaucoup sur des glissando secs, les deux amis sont familiers du funk dans les Slickaphonics. Même si la musique de BassDrumBone est parfois plus abstraite, comme le fait entendre « Afternoon Continues » quand Helias introduit à l’archet un morceau long et touffu où le trombone travaille à la sourdine, la puissance du groove du trio n’est pas négligeable. La troisième lame de l’orchestre n’y est pas étrangère, puisque le batteur Gerry Hemingway n’agit pas ici en simple coloriste. « Ain’t Nuttin’ Butta » est ramassé et compact, il doit énormément à l’irréfragable complicité de la base rythmique que le trombone exacerbe.
À des périodes différentes, ces amis ont été des collaborateurs de Braxton. Si Anderson n’a pas une longue histoire avec le saxophoniste [2], il n’en va pas de même avec Helias et Hemingway qui ont été des pièces maîtresses de son travail pendant deux décennies, comme un passage de relais. Il y a dans BassDrumBone un souci évident de questionner un jazz pulsatile à travers des écritures plus complexes, une clé braxtonienne. On le constate dans « Afternoon Ends » où le trombone apparaît comme le rouage principal d’une mécanique sensible. Ses compères travaillent un matériau brut à ouvrager. Dans l’ombre, Hemingway étincelle quand chaque mouvement et chaque son est une part d’un univers cryptique. Afternoon est l’incarnation d’une musique qui n’a de cesse de se régénérer.