Chronique

Heroes Are Gang Leaders

Artificial Happiness Button

Label / Distribution : Ropeadope

Après la claque de The Amiri Baraka Sessions, l’arrivée d’un nouveau disque de Heroes Are Gang Leaders fait l’effet d’un petit séisme en prévision. Dès les premières notes de « Artificial Happiness Button », qui donne le ton et son nom à l’album, on retrouve immédiatement l’ADN de HAGL, cette effervescence caractéristique d’un collectif bouillonnant, créant dans l’urgence une musique qui résonne comme un manifeste, la célébration d’une parole libérée.

Le temps de l’hommage au poète Amiri Baraka qui a motivé l’initiative du projet de départ est passé, et si son esprit perdure, une nouvelle ère s’ouvre avec cet album plus resserré, qui semble laisser davantage parler la musique là où le verbe autrefois était crucial. Cette nouvelle production donne une plus forte impression de groupe structuré, bien qu’éclaté, et apparait sous les traits d’un collectif grandi, pas par le nombre mais par son aura si particulière. Le noyau dur est toujours là, avec Thomas Sayers Ellis, James Brandon Lewis, Margaret Morris et Heru Shabaka-ra, piliers d’un collectif au cœur d’une œuvre qui semble dans un processus d’extension permanente.

Lewis signe la plupart des musiques et Ellis la plupart des textes, sur lesquels le poète teinte la musique, qui est moins là pour enjoliver les mots que pour les faire résonner fort, et le plus loin possible. Du religieux « Mista Sippy » au groove cardiaque de « Hurt Cult », au psyché-mélancolique « Internet Kill Switch », on passe par à peu près tous les états. Une dimension mystique irrigue chaque titre, dont deux révèlent la présence de William Parker et Jaimie Branch, sans grande surprise puisqu’ils sont ici chez eux.

S’il y a moins de morceaux que d’habitude, c’est parce qu’ils sont plus longs, et prennent davantage le temps de marquer les esprits. De toute façon, le disque est à peine sorti qu’on nous annonce un prochain album à paraître, déjà enregistré à Berlin, et qui aura pour titre POPschutz. La créativité débordante et incessante de l’ensemble va plus vite que la musique. Mais la musique, elle, va droit au cœur.

par Raphaël Benoit // Publié le 17 mai 2020
P.-S. :

Heroes Are Gang Leaders  :
James Brandon Lewis (sax, p, comp, voc), Thomas Sayers Ellis (voc, poésie), Luke Stewart (b, voc), Margaret Morris (voc), Janice Lowe (synth, fl, voc), Brandon Moses (g), Heru Shabaka-ra (tp), Warren “Trae” Crudup (d), Melanie Dyer (vln), Devin Brahja Waldman (synth, voc), Nettie Chickering (voc), No Land (poésie, voc), William Parker (b), Devin Brahja Waldman (as), Sean Berry (d), Jamie “Breezy” Branch (tp), Randall Horton (poésie, voc), Crystal Good (voc), Jenna Camille (voc), Samantha Riott (voc), Ambrose Bye (voc), Anne Waldman (voc), Savannah Grace Harris (dms, voc), Cecilia Vicuna (voc), Em Rose (voc), Christian Black (voc), Bonita Penn, (voc), London Butterfield (voc)