Chronique

Josefine Cronholm / Kirk Knuffke / Thommy Andersson

Near The Pond

Josefine Cronholm (voc, perc), Kirk Knuffke (flh, voc), Thommy Andersson (b) + Melissa Coleman (cello), Maria Potulska, Lena Fankhauser (vla), Kenny Wollesen (dms, perc)

Label / Distribution : Stunt Records

La chanteuse suédoise Josefine Cronholm nous a habitués à des albums confortables. Chaleureux, doucereux parfois, avec des sucres d’orge et du vin chaud, la faute sans doute à cette voix claire, très inspirée par une certaine pop. La rencontre avec un musicien comme Kirk Knuffke, qu’on est davantage accoutumé à voir avec Ken Filiano ou Whit Dickey, promettait d’être différente, plus risquée et ambitieuse. Near The Pond remplit parfaitement ce cahier des charges ; certes, on retrouve le goût des cordes sur « I Sang », où la violoncelliste Melissa Coleman et les altistes Maria Potulska et Lena Fankhauser s’invitent, mais le climat est très poétique, d’une belle langueur sans excès. L’exercice n’est pas simple, se maintient sur un fil, et c’est celui-ci qui donne à cet album paru chez Stunt Records son aura particulière, à l’image de « Near The Pond » où le timbre du cornet flotte sur l’archet de Thommy Andersson, contrebassiste habitué des disques de Benjamin Koppel.

Nous ne sommes pas au bout de nos surprises : à ce jeu de cuivre remarquable de Knuffke (quel son sur l’intro de « Subway », tout en ouate sur les cordes !), s’ajoute la voix du corniste. Et quelle voix ! Parmi les chansons de ce disque, on remarquera particulièrement « White Shoulder », ce genre de chanson qui reste longtemps dans la tête et sur laquelle nous prend parfois l’envie d’harmoniser. Knuffke n’y chante pas toujours, c’est un jeu de cache-cache avec Cronholm qui va chercher des basses vénéneuses en compagnie d’Andersson. Se dessine un Mississippi fantasmé qui se jetterait dans la Baltique, un endroit impossible, à jamais fantasmé qui continuerait sa course avec « Dozen a Day », rare moment où le trio n’a pas d’invité, pas même le percussionniste Kenny Wollesen qui s’intègre discrètement à toute la dynamique de l’orchestre.

Near The Pond est un objet étrange, entre disque de chanson faussement lisse et trésor de subtilité. On nous dit que ce disque, né d’une rencontre au Copenhagen Jazz Festival, est une histoire d’amour des mots. Les arrangements de cordes d’Andersson, particulièrement subtils, font le reste pour un disque doux et entêtant. Une fragrance rare.