Sur la platine

Kamilya Jubran et Sarah Murcia : Charqiya

Une nouvelle direction dans les musiques orientales ?


Kamilya Jubran

Sarah Murcia serait « aux avant-postes … d’une direction totalement nouvelle dans la musique orientale ». Interrogée, elle précise qu’il s’agit de son parcours de près de vingt ans (!) avec Kamilya Jubran. Elles y ont croisé Werner Hasler, Régis Huby, Guillaume Roy et Atsushi Sakaï.

La musique orientale !
Mais il y en n’a pas qu’une.
On pense tous à Oum Kalthoum, Abdel Halim Hafez, Farid El Atrache (tous trois d’Egypte). Il y en a tellement d’autres ! Des courants très divers, comme le malouf (arabo-andalou), certains portés par des minorités aujourd’hui disparues ou opprimées, d’autres revivifiés ou métissées. C’est tout un monde.
Revenons à Sarah Murcia et Kamilya Jubran.
Plusieurs albums et vidéos permettent de les retrouver, sans compter les concerts, en particulier au Triton. Naturellement, des articles sur Citizen Jazz leur sont consacrés.
Parmi les ressources disponibles, j’en ai choisi une qui permet de comprendre les paroles du chant : celles du poète Salman Masalha, jointes à la vidéo.
Elles sont ici en compagnie de Werner Hasler (tp, elec).

Il s’agit d’une musique âpre, rude, qui va à l’essentiel. Ce n’est pourtant pas une musique de la retenue. Il faut au contraire se dépouiller de son quant-à-soi pour laisser le texte parler, et il est bouleversant. Il faut le projeter hors de soi, quitte à emporter des morceaux de chair avec. La voix grave de Kamilya Jubran, son oud pourraient peut-être suffire. Mais il y a Werner Hasler qui auréole le chant de nuées électroniques. Et les cordes de Sarah Murcia. Lorsqu’elle se décide à jouer, à pincer résolument ses cordes sombres, le chant semble trouver un nouvel élan, plus ample, plus poignant encore. La basse martèle, obsède, libérant l’espace pour un contre-chant électronique. Cette basse fait aussi office de muscle cardiaque, puissant, irriguant le reste des corps.
Je vous laisse découvrir Charqiya, l’oriental(e). Jusqu’au bout.

Cette sortie brutale du rêve, cette bascule dans le vide vous frustrent ? On aurait oublié qu’il ne s’agit que d’un extrait d’un chant qui pourrait ne pas avoir de fin.
Une direction nouvelle dans la musique orientale ?
A l’écoute, qui en douterait ?