Chronique

Louis Sclavis

Characters on a wall

Louis Sclavis (cl), Benjamin Moussay (p), Sarah Murcia (cb), Christophe Lavergne (dm)

Label / Distribution : ECM

Louis Sclavis donne une suite indirecte à Napoli’s Walls, paru en 2003, avec Médéric Collignon, Vincent Courtois et Hasse Poulsen. Seize ans plus tard, il prolonge ainsi son travail autour de l’œuvre d’Ernest Pignon-Ernest avec une belle obstination et surtout un langage renouvelé. A la tête cette fois d’un quartet plus “classique”, il invite à un voyage d’une grande limpidité qui, plutôt que de creuser un son, semble glisser à la surface tant tout y semble évident.

On retrouve son goût pour les mélodies immédiates de culture “française” mais, débarrassées de tout effet superfétatoire, elles sont réduites à leur plus simple expression - innervées d’expressivité, en revanche, par l’interprétation des musiciens. Celle du clarinettiste en première ligne qui, là encore, n’a jamais aussi peu joué de sa virtuosité. Coutumier pourtant des envolées débordantes, il est ici d’une sobriété saisissante qui valorise la rondeur de son instrument et la fluidité de son jeu. Avec un sens du contrechant et de l’ellipse, Benjamin Moussay incarne le partenaire idéal. Depuis longtemps maintenant (depuis Sources au moins en 2012), il l’accompagne par un piano limpide qui enrichit le propos général de climats étales. Posant des ambiances équilibrées et flottantes, il est le scénographe d’une musique évocatoire où l’émotion est toujours présente.

La batterie coloriste de Christophe Lavergne, qui n’hésite pas à s’effacer au besoin, et la basse chaleureuse (parfois mordante) de Sarah Murcia apportent ce qu’il faut de dimension pulsatile aux huit titres de ce disque pour ne pas verser dans le pathétique. Sans emphase, toujours impeccablement construits, ils s’écoutent dans la continuité, traversés par une mélancolie assumée situant le quartet dans un processus qui déborde le geste musical, le plaçant plutôt dans un cheminement qui va du cœur à l’oreille et de l’oreille au cœur.