Scènes

Peter Berstein à Vitrolles : ce qui vient après…

Peter Bernstein Quartet jouait au Moulin à Jazz


Peter Bernstein Quartet © Gérard Tissier

Quand l’un des guitaristes des plus appréciés de la planète jazz déboule sur la scène du Moulin à Jazz, on ne peut que s’attendre à une performance de haute tenue. L’homme a titillé ses cordes aux côtés de Joshua Redman il y a près d’un quart de siècle et n’a jamais cessé de frayer au sein de trios orgue/guitare/batterie, avec notamment Larry Golding. Sideman recherché, il n’en est pas moins un inlassable chercheur en notes bleues, en guitariste phare du post-bop qu’il est. Pendant le confinement du printemps 2020 ce New-Yorkais a composé son dernier album, What Comes Next avec, entre autres, Sullivan Fortner au piano.

Sullivan Fortner/Peter Bernstein © Gérard Tissier

Pour la tournée européenne de cet automne 2022, c’est l’Italien Roberto Gatto qui officie à la batterie (depuis ses tournées avec Chet Baker, il est à soixante-quatre ans l’un des batteurs les plus capés du vieux continent) et l’Américain Doug Weiss à la contrebasse (« un des meilleurs contrebassistes du monde », dixit Brad Mehldau).

Le premier set commence par un méchant swing au taquet, sur lequel les échanges guitare/piano font des étincelles. Entre le lyrisme bluesy de Peter Bernstein et la poétique « bud powellienne » de Sullivan Fortner, il pleut des coups durs. La rythmique assure un drive imparable et soyeux. Après notamment une reprise d’un thème de Gary Bartz (oui, un groupe sans saxophone peut reprendre ce dernier), le titre du morceau qui donne son nom au projet prend tout son sens : qu’est-ce qui vient après ?
L’après, pour ce groupe, c’est le maintenant, assuré notamment par le jeu polyrythmique du guitariste sur un groove impair rehaussé par les bombes de grosse caisse du batteur et par le contrepoint sublime du pianiste. Les structures harmoniques de ce premier set empruntent certes à des formes convenues, dont l’anatole, mais elles n’en sont pas moins pleines de surprises rythmiques qui permettent aux solistes de s’affranchir de leurs contraintes.

Le second set devait confirmer cette tendance émancipée avec des propositions plus modales. Pendant que Bernstein déroule des coltranismes guitaristiques (un jeu fondé sur des progressions en quartes), la rythmique se lâche, jusqu’au pianiste qui, littéralement, met les coudes. Le groupe esquisse les contours d’un terrain de jeu onirique où les pentatoniques sont reines, en particulier sur une version de « Love For Sale » qui fleure bon Wes Montgomery, guitare oblige.
« No Problem », de Duke Jordan, est l’occasion pour le groupe de confirmer sa joie de s’exprimer sur la scène vitrollaise. D’autant plus que l’assistance est, ce soir-là, composée de fidèles de la regrettée salle de Marseille, le Jam…
Swing oblige !