Chronique

The OGJB Quartet

Bamako

Oliver Lake (as, ss), Graham Haynes (cornet), Joe Fonda (b), Barry Altschul (dm, perc)

Label / Distribution : Tum Records

L’OGJB Quartet. Derrière ce nom bizarre, se cachent les premières lettres du prénom d’Oliver Lake (1942), Graham Haynes (1960), Joe Fonda (1954) et Barry Atschul (1943), dangereux activistes new-yorkais et vieux briscards du free jazz. Dans les notes de pochette, Lake précise : « La musique est le leader et c’est pourquoi l’album n’est attribué à personne en particulier ». Un quartet sans leader donc pour un free jazz à l’ancienne, collectiviste et mélodique comme on les aime. Un thème rapidement ébauché, des improvisations échevelées, une idée poussant l’autre, des sonorités aiguisées et intenses et des musiciens ultra connectés entre eux.

L’album débute par un long morceau de près de quinze minutes composé par Joe Fonda, « Listen to Dr. Cornel West », hommage au philosophe et activiste afro-américain. Annonce du thème ; puis Lake et Haynes ferraillent dans l’aigu, soutenus par le drumming ébouriffant de Atschul ; long solo musclé de Fonda à la contrebasse qu’il termine par un riff sautillant (qu’il réitérera ad libitum jusqu’à la quasi-fin du morceau) sur lequel les deux soufflants viennent unir leur voix dans une sorte d’hymne grandiloquent ; solo fiévreux de Haynes, retour au thème et basta. Efficace et sans concession. Le ton est donné. Au suivant.

Le suivant justement est un titre de Graham Haynes (cofondateur du collectif M-Base avec le saxophoniste Steve Coleman, faut-il le rappeler) intitulé « Bamako ». Haynes et Altschul (respectivement au dousn’gouni et à la mbira, instrument ancestraux d’Afrique de l’Ouest)) ainsi que Joe Fonda tricotent un canevas harmonique souple et lancinant sur lequel Oliver Lake récite un poème de son cru, « Broken in Parts ». Hommage à l’Afrique, à la nature sauvage et aux anciens (on pense à « A Love Supreme » de Coltrane).

Le reste de l ’album est à l’avenant : grammaire ornettienne (« Be Out S’Cool »), fulgurances free (« Stick », « Is It Alright ? »), figures coltraniennes (« GS #2 ») et douceurs acides (« Just A Simple Song », « 3 Phrase 09 »). L’album se referme sur deux improvisations collectives débridées sobrement intitulées « OGJB #1 » et « OGJB #2 », où l’on se dit quand même qu’improviser, qui plus est à quatre individus, c’est tout un art.