Chronique

Frisell, Downes, Cyrille

Breaking The Shell

Bill Frisell (g), Kit Downes (org), Andrew Cyrille (d).

Label / Distribution : Red Hook

Celles et ceux qui suivent la carrière de Bill Frisell seront peut-être un peu déroutés par ce nouvel album. Breaking The Shell ne correspond pas à l’esthétique, aux esthétiques auxquelles Bill Frisell nous a habitués dans ses derniers albums. D’autant plus que la présence dans le line-up d’Andrew Cyrille – avec qui Bill Frisell joue depuis longtemps – est un élément qui, de prime abord, peut laisser penser qu’on va se régaler avec l’univers si caractéristique du guitariste américain.

Ce n’est pas le cas mais le plaisir est là, bien là même, et on savoure – peut-être plus encore – cet écart. Certes, il ne s’agit pas d’une gymnastique acrobatique mais tout de même. Car ce n’est pas sur le terrain de la néo-folk américaine que nous amènent les trois musiciens. Nous sommes ici dans un registre plus mystique encore, quelquefois sombre – le son de l’orgue de Kit Downes y contribuant largement. Si on devait faire un rapprochement, on pourrait convoquer l’emblématique « Tales From The Far Side » publié dans Bill Frisell Quartet en 1996. On trouve ainsi, tant dans Breaking The Shell que dans « Tales From The Far Side », un récit musical bourré de suspense, d’images sonores figuratives, un potentiel cinématographique dans lequel émergent l’inquiétude, l’étrangeté, des motifs très lents, quelquefois rubato, qui se déploient avec beaucoup de volume et d’épaisseur. On est saisi par chaque son, chaque combinaison, chaque murmure car – et là, pour le coup, on retrouve la patte Frisell – tout est susurré.

par Gilles Gaujarengues // Publié le 16 février 2025
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