Scènes

Les Vibrants ont 20 ans !

Le collectif rouennais nous enchante depuis 2001.


Vibrants Défricheurs (c) Jacky Cellier

Voici vingt ans que les Vibrants Défricheurs ont réveillé la belle endormie. Au départ collectif d’affinités et d’amitiés né sur les bancs du lycée, il a été le révélateur d’une génération dorée d’artistes pluridisciplinaires. Mieux : l’âge et la maturité venant, la bande des Vibrants n’a cessé de s’agrandir et pèse désormais lourd dans le paysage culturel de la capitale normande sans pour autant avoir perdu l’envie et l’ingénuité des premières années. La famille des Vibrants Défricheurs invitait Rouen à souffler leur bougies en conviant de proches cousins, de l’indéfectible André Minvielle au compagnon des premières années Fidel Fourneyron en passant par une nouvelle venue, l’explosive Leïla Martial.

Vingt ans en deux temps. D’abord le vendredi soir, au Trianon Transatlantique de Sotteville-lès-Rouen, une salle qui compte et a compté dans l’histoire des Vibrants. En 2004, c’est là que s’est produit le Parterre Trio, formation préhistorique où l’on trouvait déjà Raphaël Quenehen et Jérémie Piazza. En 2021, c’est l’esprit bal malgré une colonne vertébrale clairement construite autour de Papanosh , celui qui fait les belles nuits du festival Mens Alors !, qui est sur scène. Et dans la fosse, évidemment, puisque le spectacle ne peut pas s’arrêter à l’estrade. Sur scène, c’est tournant, c’est vivant : Fawzi Berger, un ami d’Uzeste, use de toutes sortes de percussions, en prête quelques-unes à Tiphanie Moreau, laisse la place à un chœur fanfaron réglé par Quentin Ghomari... Et au milieu de tout ça, Leïla Martial danse et chante. Du Piaf, des traditionnels de toutes latitudes. Et puis aussi avec André Minvielle ; très vite, on se dit que cette rencontre inédite est évidente. Il se passe quelque chose.

Vibrants Défricheurs (c) Jacky Cellier

Le lendemain nous le confirmera. Oui, l’univers des deux artistes, celui du Vocal’chimiste et de la chanteuse multi-timbrée, est entré en symbiose. Au café de l’Epoque, estaminet prisé des cultureux rouennais, Minvielle et Martial ont entrepris, avant le déjeuner, de vider leur sac : deux cabas à malice remplis d’objets et d’envies... Les flacons où souffle Leïla pour évoquer les Pygmées, les cachous en boîte alu qui font de belles maracas. Quiconque voudrait définir le plaisir de l’improvisation n’aurait qu’à citer ce trop court moment où les deux vocalistes se sont cherchés en rigolant pour finir sur une belle chanson de Marc Perrone. Il y a un respect mutuel dans cette rencontre entre générations. De quoi, assurément, bien lancer une après-midi passée dans les locaux des labos Victor Hugo, école désaffectée du centre-ville où les Vibrants Défricheurs ont élu domicile pour fêter l’anniversaire.

Soleil Noir (c) Franpi Barriaux

Au programme, plusieurs orchestres du collectif : Uccelli de Sébastien Pallis et Frédéric Jouhannet qui offraient un nouveau répertoire ; les habituels perce-plafond, mise en son des œuvres des graphistes du collectif projetées au plafond, ou encore quelques aventures improvisées avec Gilles Coronado, ou Héloïse Divilly avec Linda Oláh dans You. L’après-midi cependant aura deux temps forts. D’abord Soleil Noir, de la mezzo-soprano Margot Mellouli avec le contrebassiste Matthieu Teissonnière, lecture lyrique de Soundgarden à Berthold Brecht en passant par Björk, remarquable jeu de miroirs qui traverse le temps. Ensuite, comme pour clore ce week-end, André Minvielle rencontrait le pianiste Antoine Berland. Ce dernier a l’habitude de beaucoup écrire autour de son univers si singulier. La rencontre fut riche, entre les cloches, les baguettes et toutes sortes d’objets pour préparer le piano pendant que Minvielle jouait des effets de voix ou avec un sac plastique, méduse chimérique. Les Vibrants nous enchantent depuis 20 ans. Ce charmant week-end en témoignait avec force. Il reste tant d’années à en profiter encore.