Tomas Fujiwara’s 7 Poets Trio
Pith
Tomas Fujiwara - d, comp ; Tomeka Reid - cello ; Patricia Brennan - vibes
Label / Distribution : Firehouse 12 / Orkhêstra
Pith, en anglais c’est la moelle. Là où tout se passe, le centre nerveux, la condition du mouvement. Une matière un peu mystérieuse. Comment ne pas juger ce titre pertinent à l’écoute du 7 Poets Trio du batteur Tomas Fujiwara ? Avec à ses côtés la violoncelliste Tomeka Reid, architecte rythmicienne dans « Solace » où elle joue tout en pizzicati des plus fluides, Fujiwara semble pouvoir aller partout : le disque est empreint de sa musique, nécessairement, mais on songe souvent au quartet de la jeune femme, pour le mélange parfait entre rigueur et rondeur dans la discussion permanente entre le violoncelle et la batterie. « Other », plus complexe et moins direct, en est l’illustration parfaite, Tomeka Reid passant à l’archet pour laisser la tension tout entière à Fujiwara, toujours d’une rare finesse dans son jeu très coloriste.
Dans ce morceau comme ailleurs, c’est la troisième lame de cet orchestre qui est l’élément perturbateur, ou le liant tour à tour. Dans ce rôle, la vibraphoniste Patricia Brennan est précieuse. On avait déjà pu apprécier la synergie du trio dans son premier disque sorti chez RogueArt, mais ici, la recette est plus nerveuse. Même si « Resolve » reprend des chemins connus, le violoncelle s’imprégnant du timbres des mailloches pour quelques errances psychotropes, le 7 Poets est solidement campé sur sa rythmique, à l’instar de « Josho » où le violoncelle fait des miracles en dépit de son apparente simplicité ; sur le précédent album, nous notions un Fujiwara très concentré sur ses fûts ; ici, c’est au contraire son approche des cymbales qui est mise en avant. C’est Brennan qui en tire le meilleur parti, jouant tout autant le contraste que le liant sans chercher la lumière. Il n’y a ici aucune centralité, uniquement de la synergie.
Avec ce nouvel album du 7 Poets Trio paru chez Firehouse 12, on a le sentiment que ces incroyables mélodistes se muent en irréfragables rythmiciens. Prônent la polyvalence. « Swelter », avec ses relents de rock qui vont si bien à Tomeka Reid, en atteste. Le propos est solide mais à la fois très souple, plein d’arabesques et d’une simplicité confondante. Le secret de ce Pith, c’est son extrême souplesse. Tomas Fujiwara aurait pu chercher l’inédit, voire l’inouï avec son instrumentarium hors du commun. Dans la droite lignée du précédent album de 2019, le 7 Poets choisit d’aller droit au but, avec une conviction plus affirmée. Pith est un album qui va à l’os. C’est bien là le destin de la moelle.