Chronique

Trondheim Jazz Orchestra

Happy Endlings

Label / Distribution : Odin Records

S’il fallait se lancer dans des comparaisons forcément oiseuses, on pourrait parler du Trondheim Jazz Orchestra (TJO) comme d’un ONJ à la mode norvégienne. Installé depuis 20 ans dans le fjord de la grande ville universitaire du royaume, l’ensemble n’a pas le statut institutionnel de son aîné français. Depuis de nombreuses années, c’est le contrebassiste Ole Morten Vågan qui dirige, appliquant ses idées et son sens de la composition à un orchestre mouvant et accueillant. Nombreux sont les artistes de renom passés en son sein, tels Kim Myhr ou Christian Wallumrød ou des invités internationaux du calibre de Chick Corea ou Pat Metheny. Avec Happy Endlings, le JTO rassemble douze Norvégiens pour un long disque à la ligne directrice difficile à saisir, entre les touches zappaïennes de « Vilken Låt Ska Vi Inte Spela Nu », qui met en scène une ligne de soufflants orgiaques, et « Me Tar Sand, You Jane » où la voix de Sofia Jernberg tente d’ordonner le chaos en coagulant une base rythmique turbulente.

L’impression du tutti frutti. C’est sensible lorsque s’élance le long « Disco Dreams », où la clarinette basse d’Espen Reinersten vient encadrer une mélodie lyrique dominée par la voix avant de se décharner peu à peu et de s’en tenir aux rythmes conquérants des deux batteurs qui s’installent chacun sur un canal. C’est charmant, mais on peine à trouver une ligne directrice. Comme s’il fallait tout dire, dresser un panorama, se faire léger et orageux en même temps, montrer son habileté et sa force de frappe.

Le résultat n’est pas désagréable. Il permet de découvrir de belles individualités, à l’image du claviériste Ståle Storløkken qui sait bien utiliser son Hammond pour pousser un peu plus les batteurs dans leurs retranchements. On aura également confirmation de la puissance du tromboniste Øyvind Braekke, connu pour jouer dans The Source, qui fait des merveilles sur « The Barrage Jam ». Ce dernier morceau, sans doute le plus libre de ce disque, permet à l’orchestre de lâcher prise sur la volonté démonstrative perçue par ailleurs et de révéler une esthétique cohérente éloignée des effets de manche. Un disque dont on sort étourdi et lessivé, comme après un banquet trop riche.

par Franpi Barriaux // Publié le 27 janvier 2019
P.-S. :

Ole Morten Vågan (b, comp, dir), Sofia Jernberg (voc), Ola Kvernberg (vln), Eivind Lonning (tp), Øyvind Braekke (tb), Fredrik Ljunkvist (ts, cl), Espen Reinersten (ts, bcl), Eirik Hegdal (bs, as, cl), Øyvind Engden (cello), Oscar Grondberg (p), Ståle Storløkken (cla), Gard Nilssen (dms), Håkon Mjåset Johansen (dms)