Sur la platine

Audio Rebel : Samuel Blaser et Marc Ducret

Un duo avec Marc Ducret sur la page Bandcamp de Samuel Blaser


Tromboniste suisse, Samuel Blaser est un fidèle des colonnes de ce magazine. Il met en ligne aujourd’hui une partie de sa musique en leader via une page Bandcamp qui réunit en accès quasi-total certains de ses disques. Notamment un concert en duo enregistré au côté de Marc Ducret.

Pour qui souhaite découvrir son travail, la page est idéale. Une douzaine de disques sont accessibles, signés par le tromboniste depuis une grosse dizaine d’années. On y trouve quelques-unes des formations qu’il a pu diriger et une diversité de configurations dans lesquelles il aime évoluer. Solo, duo, trio, quartet, principalement (et un septet), il est de ces musiciens à l’aise dans les formations resserrées où il peut s’exprimer avec force et donner à entendre l’étendue de ses capacités.

Outre le trombone, interviennent des interprètes d’importance. A commencer par Paul Motian, avec qui il enregistre Consort In Motion en 2010, ou le batteur Gerry Hemingway sur le délicat Fourth Landscape que complète le piano préparé de Benoît Delbecq. Wallace Roney et Oliver Lake sont également de la partie sur le notable Early in The Morning édité voici deux ans, dans lequel ils réinvestissent d’anciens blues avec l’esprit moderne qu’on imagine. À l’avenant, vous croiserez également Russ Lossing, Joachim Badenhorst, Thomas Morgan ou Tyshawn Sorey. De quoi satisfaire les oreilles.

Sans être agressif, le duo est pugnace

Deux disques sont parus chez Hat Hut en quartet (avec Gerald Cleaver (dm) et Banz Oester (b)) ; la collaboration avec le guitariste Marc Ducret est étroite [1]. Pour preuve, ce nouvel enregistrement sorti fin mars 2020. Issu d’une captation live réalisée à Rio de Janeiro en 2013, Audio Rebel donne à entendre le tromboniste et le guitariste dans l’épanouissement d’une confrontation réussie où les caractéristiques de jeu sont mises en valeur.

Sans être agressif, le duo est pugnace et sait ce qu’il veut dire. Stimulé par les modalités de jeu nerveuses, le son de Ducret est précis et inventif. Tant du point de vu des timbres que des phrasés, il joue de l’électricité avec un éclectisme qui va de la lacération offensive à des fonds de court dessinant des lavis brûlants investis par le trombone. Pleine et chaleureuse, la palette de ce dernier est large, elle aussi. Et mobile ! Soutien ou soliste, il est de toutes les configurations, à la recherche toujours de lignes mélodiques sinueuses et obliques. Une technique maîtrisée lui permet de nombreuses acrobaties.

L’échange est cependant fluide et la musique circule. Tantôt en contre-chants, tantôt enchevêtré, toujours éclairé d’une couleur nouvelle à chaque repartie, le discours joue d’une efficacité qui n’abuse pas de surenchère mais soigne des déroulés évocatoires où l’implication des interprètes est une plus-value au propos. Le langage est polysémique et supporte plusieurs écoutes attentives. Et pour ceux qui en veulent un peu plus, Samuel Blaser propose également sur sa page un trio avec le même Ducret et Peter Bruun (accessible en partie cette fois).

par Nicolas Dourlhès // Publié le 14 juin 2020
P.-S. :

[1Ajoutons également un trio avec Peter Bruun, toujours chez Hat Hut et qui ne figure pas ici. Samuel Blaser joue également dans le Metatonal du Français, tout comme sur Lady M.