Scènes

Emile Parisien et les sauvages

Le quartet du saxophoniste est passé à l’action à Valence


La programmation de Jazz Action Valence de cette saison 2019-2020 a ouvert les hostilités avec le plus célèbre des quartets de l’Hexagone.

L’Emile Parisien 4tet est monté sur scène gonflé à bloc pour défendre le répertoire de Double Screening, son dernier album en date (ACT, 2018). Rodé par des mois de tournée, le groupe n’a pas mis longtemps à investir la scène et captiver la salle.

Ce répertoire est aussi le premier avec Julien Loutelier à la batterie, qui a aujourd’hui complètement pris sa place au sein du quartet. Succéder à Sylvain Darrifourcq n’est pas chose aisée. Venir mettre son grain de sel dans une recette qui a fait ses preuves et qui s’est bâti une telle identité, le tout sans la ternir, n’est pas à la portée de tout le monde. Mais le batteur est visiblement taillé dans le rare et permet au quartet de poursuivre sa voie, de garder sa touche et sa débordante créativité, tout en la réinventant avec une nouvelle distribution des cartes. En apportant dès son arrivée ses propres compositions, l’autre Julien du quartet annonce d’emblée qu’il n’est pas là pour pallier une absence, mais pour écrire sa part de l’Histoire par sa présence.

L’évolution musicale du quartet se manifeste à travers sa nouvelle version de « Chocolat-Citron », un titre enregistré sur Chien Guêpe en 2012 et ici tranché en 4 parts de Hashtag. La consistance de sa musique est identique et reconnaissable entre mille, mais elle a pris une couleur différente. Plus sauvage, moins policée, arrivée à un niveau de maîtrise inégalé malgré sa complexité, la musique du groupe prend un côté plus subversif dans sa forme.

Si l’on voulait résumer, on dirait que le quartet se tourne aujourd’hui plus franchement vers le jazz avec l’intention de lui secouer les puces, là où il aurait autrefois foulé les terres des musiques contemporaines improvisées. La nuance n’est pas minime. Et elle joue probablement un rôle dans le fait qu’on n’a jamais trop entendu le quartet d’Emile Parisien, et qu’on en redemande. Parce qu’il se renouvelle toujours et arrive encore à nous souffler comme si c’était la première fois.