Chronique

Kresten Osgood Quintet

Live at H15 Studio

Erik Kimestad (tp), Mads Egetoft (sax), Jeppe Zeeberg (p), Matthias Petri (b), Kresten Osgood (d) .

Label / Distribution : ILK Music

Le batteur danois est très demandé sur la scène européenne et américaine, mais Kresten Osgood maintient son quintet à la maison depuis une dizaine d’années et c’est à chaque fois une orgie de jazz chaud et luisant. Grand connaisseur de son histoire et de sa discographie, Osgood aime le jazz et aime à le diffuser. Il n’est jamais avare d’un petit discours avant les morceaux pour contextualiser le choix des titres qu’il va puiser dans l’immense réservoir de standards accumulés depuis plus d’un siècle. Il se sert, avec une légère préférence pour les thèmes écrits après les années 40, dans le bop et le hard-bop. Ici par exemple, sont joués Elmo Hope, Slide Hampton ou Clifford Jordan. Mais on trouve également des thèmes de Kirk Knuffke ou Osgood lui-même.

Pour interpréter le répertoire de cette Great Black Music comme l’appelait Roland Kirk, il a rassemblé le pianiste Jeppe Zeeberg, le contrebassiste Matthias Petri, le saxophoniste Mads Egetoft et le trompettiste Erik Kimestad. Cette belle équipe connaît les standards sur le bout des doigts et se met au service du batteur. Car sur scène, il y a une énergie doublée d’un humour tranchant, d’un lâcher-prise et d’une désinvolture qui cachent bien le travail et la concentration. Par chance, il m’est arrivé de les voir sur scène à plusieurs reprises et par hasard lors de l’enregistrement de ce disque, lors du festival de Copenhague en 2023. Le H15 est un endroit simple, une pièce en forme de cube, sans scène ni gradins où se sont pressés (entassés conviendrait mieux) des dizaines de personnes pour assister à ces trois concerts de fin de journée de festival. Chaque jour, les musiciens donnaient plusieurs concerts dans divers lieux du festival et ils arrivaient donc à H15 autour de minuit, fatigués, mais chauds et prêts à tout. Le public est dans le même état, qui enchaine les concerts. Aussi, ces trois soirs mémorables ont été bouillonnants et cet enregistrement en témoigne avec fidélité. Les micros ont bien capté l’ambiance dans la salle et cette musique tonique et chaleureuse. On y trouve quelques belles prestations de solistes, comme celle du pianiste Jeppe Zeeberg sur « A Case of Emergency », du trompettiste Erik Kimestad sur « Boa » et du saxophoniste Mads Egetoft sur « Gilbert’s Mood ». Tout le long, Osgood pratique un drumming en avant, poussant à la cymbale et relançant à la caisse claire, avec plein de petites touches en sonnailles. L’une des pièces où le groupe s’exprime le mieux ensemble est sûrement « The Halley’s Comet – Light Blue Blues » dont l’arrangement est à leur image.

L’exigence et la curiosité des musiciens pour les musiques indisciplinées n’empêche nullement de s’emparer du répertoire pour en faire jaillir d’éclatantes saillies. Il en va de même avec nos oreilles.

par Matthieu Jouan // Publié le 13 avril 2025
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