Chronique

François Carrier Ensemble

Openness

François Carrier (as), Tomasz Stańko (tr), Mat Maneri (vla), Gary Peacock (b), Michel Lambert (dms).

Label / Distribution : Fundacja Słuchaj

La relation entre François Carrier et le contrebassiste Gary Peacock est ancienne, mais jusqu’ici n’avait donné lieu qu’à peu de publications. Nous l’avions évoquée lors de sa récente interview, riche en anecdotes. Il y a 20 ans paraissait Travelling Light avec Peacock et Paul Bley, mais aussi comme une évidence le batteur Michel Lambert, indéfectible compagnon du saxophoniste. Sans Paul Bley mais avec d’autres prestigieux invités, la discographie de François Carrier et Gary Peacock s’agrandit avec un pléthorique Openness, enregistré en 2006 à l’occasion d’une série de concerts à Montréal. L’orchestre réuni ces deux soirs de mai est proprement ahurissant, puisqu’au trio des deux Québécois avec le contrebassiste s’ajoutent le trompettiste Tomasz Stańko et l’altiste Mat Maneri pour une discussion intense, telle qu’on l’entend dans « Wide Awakening », avec un travail de fond très dense entre la base rythmique et une discussion où Maneri et Carrier font face à une trompette très volubile. Mais dans ce triple disque, toutes les possibilités restent ouvertes, et tous les cas de figure sont possibles.

Ainsi, dans « Come & Go », à l’entrée du troisième disque, on entend un échange assez émouvant entre Peacock et Stańko que Lambert ponctue avec douceur. Openness est le témoignage d’une musique qui se laisse le temps, un espace de liberté offert à de remarquables solistes. À tout instant, le rôle de Maneri en tant qu’électron libre de ce François Carrier Ensemble est d’ailleurs tout à fait fascinant. Qu’il soit sur le devant de la scène avec le trompettiste (« Pathless ») ou en charge du luxe de détails, ce sont bien souvent les cordes qui font basculer l’improvisation d’un climat à l’autre.

Quant à Carrier, qu’on retrouve là au tout début de sa carrière, il laisse beaucoup de place à ses compagnons, assez éloigné de l’urgence qui caractérise ses rencontres actuelles à travers le monde. Il n’en perd pas moins le caractère inflammable de son jeu, à l’image de ce beau tutti de soufflants dans « Spirit of Connection ». Proposé par le label polonais Fundacja Słuchaj, Openness est une très belle archive qui met davantage en lumière les premières aventures du saxophoniste québécois.

par Franpi Barriaux // Publié le 31 mars 2024
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