Scènes

Le Petit Faucheux, en avant la musique

Ouverture de saison pour la salle tourangelle, avec les deux artistes associés


Le Petit Faucheux, photo Rémi Angéli

Soirée d’ouverture de saison pour le Petit Faucheux avec les concerts des deux artistes associés pour les deux ans à venir : le trio Meije de Léa Ciechelski et le duo de Bo Van Der Werf avec Jozef Dumoulin. L’occasion bien sûr de voir et écouter de la musique et aussi parler programmation et évoquer le contexte dans lequel évolue le club.

Quinze jours après la rentrée des classes, à la moitié du mois, c’est le lancement de la saison 2023/2024 du Petit Faucheux. Labellisé SMAC de la ville de Tours, la salle entièrement dédiée au jazz est toujours active et même fer de lance d’une esthétique pourtant mise à mal par l’économie actuelle. Ce qui la rend d’autant plus précieuse, surtout au vu de la qualité de la programmation et du soin porté à sa mise en œuvre.

Arrivé au moment de la prise de parole de Sylvain Moussé, le président du Conseil d’administration, on prend au vol le bilan dressé de l’année écoulée, les choix faits pour contrer non seulement la vague COVID de 2020 mais tout autant la vague post-COVID qui n’a pas été des plus faciles à gérer. Mais le Petit Faucheux reste un lieu dynamique animé par des gens motivés. Le renouvellement de l’équipe et les nouvelles pistes dégagées (partenariat inter-salle, investissement en matériel pour maintenir un niveau de qualité) montrent l’envie de ne pas rester en place et de toujours avancer. Sylvain Élie ensuite, le directeur de la structure, détaille la programmation à venir, qui court jusqu’en décembre.

Un festival durant la saison (Festival Émergences), des actions culturelles à destination de la jeunesse, des concerts variés dans leur public cible, et toujours cette volonté de proposer un jazz de création parfois immédiat, d’autres fois plus déroutant mais ô combien inventif. Surtout, montrer la vitalité d’une scène qui se renouvelle sans cesse. Quelques noms à venir : l’ONJ de Frédéric Maurin avec Steve Lehman, Cécile McLorin Salvant, Sophie Alour, Quonicho E, The Bridge. Allez voir le site, tout y est dit.

Jozef Dumoulin et Bo Van der Werf, photo Rémi Angéli

Deux artistes associés à la salle vont participer à son activité durant les deux années à venir. Ce sont Léa Ciéchelski, régionale de l’étape, formée à Jazz à Tours et le belge Bo Van Der Werf, figure importante du jazz européen notamment pour sa participation au groupe Octurn. Pour compléter la soirée, ils jouent à tour de rôle puis ensemble.

Meije que dirige Léa Ciéchelski est un nouveau trio. Deuxième concert seulement et une envie d’en démordre. Guitare (celle de Vincent Duchosal) et une batterie (celle de Benjamin François), pour un répertoire efficace, dur même dans une première partie, axé sur des riffs prenants et sur lequel s’appuie le saxophone de Ciéchelski. On est secoué et c’est un plaisir. Plus vaporeuse la deuxième partie soigne les ambiances éthérées et les sons dilués. Le set est de fait un peu déséquilibré mais l’ensemble est notable, l’entente est bonne entre les trois musiciens et cela se voit.

Le duo suivant nous avait séduit sur disque. Paru récemment sur Pee Wee, il est la rencontre seul à seul de deux musiciens uniques dans le paysage actuel. Jozef Dumoulin (lui aussi ancien artiste associé et fidèle de la salle) et son clavier Rhodes augmenté de quantité de pédales et Bo van der Werf, au baryton. Ils déroulent une musique de l’étrange toujours en mouvement. Sur les nappes distendues de Dumoulin, Van der Werf fait louvoyer un saxophone hiératique. Jamais malgré l’intensité de leur concentration, le duo ne fait décoller la musique, installant le public dans un état d’hypnose fascinant et qui emporte. Sur les trois derniers morceaux, à partir de compositions de la saxophoniste, le trio Meije vient les rejoindre pour un finale tout aussi planant. La feuille de route est tracée pour la saison : matière, timbre, grain, sculptures sonores et des compositions déroutantes vont, à coup sûr, ravir nos oreilles.