Scènes

Stéphane Payen convoque James Baldwin au Petit Faucheux

Le saxophoniste et compositeur présente un programme sur la figure de James Baldwin.


Baldwin en Transit © Rémi Angéli

Première soirée de l’année 2023 dans la continuité d’une saison déjà amorcée depuis septembre. Mardi 24 janvier, le Petit Faucheux reçoit la nouvelle proposition musicale du saxophoniste Stéphane Payen. Autour des textes et de la personnalité de James Baldwin, un septet déroule un programme qui appelle à une écoute attentive. 

Dans le hall du Petit Faucheux, là où se trouve le bar autour duquel tout le monde se rassemble, l’exposition des dessins de Terreur Graphique, qui sera inaugurée le vendredi suivant, est déjà installée. Treize portraits de musiciens et musiciennes de jazz se succèdent dans le style qui est le sien. Terreur Graphique est dessinateur de presse, il publie dans Libération, dans So Film et ailleurs et tient régulièrement à jour son compte Instagram. Il publie aussi dans Citizen Jazz. Il est sarcastique, efficace, perspicace, amoureux de musique et particulièrement de jazz, ses dessins sont au plus juste. Charles Mingus en King-Kong, Pharoah Sanders jouant de la flûte dans les airs, le pied attaché à un caillou. C’est drôle, décalé et bien vu. On aurait aimé en voir une plus grande galerie.

Stéphane Payen © Rémi Angéli

L’intérêt de Stéphane Payen pour James BaldwIn est ancien. Il est de ces auteurs qui marquent une vie, une rencontre. Le projet est en latence depuis longtemps et ce sont les suites du confinement, ce besoin de repartir de l’avant qui le poussent à l’accoucher enfin. Il en parle à Mike Ladd puis constitue un groupe.

Sur scène, ils sont trois et quatre. Trois voix qui s’expriment en spoken word. Mike Ladd donc, Jamika Ajalon qu’on a connue dans le groupe d’électro-dub angevin Zenzile et Tamara Singh, hortithérapeute et art-thérapeute, militante en questions de santé mentale queer et post-coloniales. Derrière, violon, saxophone, flûte et guitare électrique, une petite formation chambriste dans laquelle on reconnaît Dominique Pifarély, Stéphane Payen (à l’alto droit), Sylvaine Hélary et Marc Ducret.

Le dispositif est simple. Sur le devant du plateau, les voix parlent de, autour, à partir de James Baldwin. I·elle·s sont tout·e·s les trois afro-américain·e·s. Forcément, c’est important avec un pareil auteur. Qui justement a su trouver la hauteur pour parler de tout cela. Et sur des textes qui leur appartiennent, ils se livrent, ils délivrent des mots, forts, puissants, des slogans sincères qui marquent.

En accompagnement, l’intelligence de Payen consiste à ne pas surjouer l’activisme. Pas de free jazz mal venu, pas de hip-hop mal blanchi. Pas de batterie d’ailleurs, mais une musique d’une belle douceur. Des consonances mouvantes par des musiciens en délicatesse sachant laisser la place aux mots. Les souligner, les envoyer vers l’avant ou les couvrir pudiquement pour mieux les exprimer.

Il y a quelque chose de l’ordre de l’intime, de l’ordre de la maïeutique aussi chez Stéphane Payen qui laisse ainsi à ses partenaires la possibilité de dire en les accompagnant. Dans le public, ce soir-là, des élèves sont présents. Attentifs, captivés, leur enthousiasme au moment d’applaudir montre qu’ils ont compris. La jeunesse comprend tout des luttes anciennes.