Chronique

Pierre Marcus

Following The Right Way

Baptiste Herbin (as, ss), Irving Acao (ts), Simon Chivallon (p), Pierre Marcus (b, comp), Thomas Delor (dms) + Renaud Gensane (tp), Alexis Valet (vib), Jeremy Hinnekens (p), Aleksander Dzhigov (gaida).

Label / Distribution : Jazz Family

L’encyclopédie dit du blaireau qu’il est un animal « capable de construire de vastes galeries familiales ». Loin de nous l’idée d’affubler Pierre Marcus d’un tel sobriquet, mais à écouter la musique chaude et intense du contrebassiste, à lire ses déclarations d’amitié envers les musiciens qui l’entourent, on se dit qu’il y a bien une dimension familiale dans son approche de la vie et sa volonté de toujours « suivre la bonne voie », à travers les innombrables galeries auxquelles la vie nous confronte.

Following The Right Way est le troisième album de ce musicien niçois « monté à Paris » comme on dit, après Longue attente en 2015 et Pyrodance en 2018. Voyageur flanqué de son chien Django (en bonne place sur la pochette des disques au point qu’on le soupçonnerait volontiers de vouloir voler la vedette à son maître), Pierre Marcus porte la bonne parole intercontinentale en célébrant la Bulgarie, la Grèce Antique, New York ou l’Afrique. C’est une sorte de diplomate du jazz, mais dont le langage n’aurait nul besoin d’un savant décodage pour être compris de tous. Car celui du contrebassiste, bien au contraire, parle sans détour, en provenance et en direction du cœur. Qu’il interprète ses propres compositions ou des reprises dûment choisies (Monk, Mingus, Pettiford), Pierre Marcus va droit au but dans une forme d’euphorie communicative, à l’instar de la composition titre du disque ou d’une lumineuse et très émouvante reprise de « Bemsha Swing ».

Il faut dire aussi que ce jeune homme est parfaitement entouré, laissant une fois de plus aux deux pointures Irving Acao et Baptiste Herbin le soin de souffler le chaud aux saxophones. Une jeune garde qu’on connaît bien par ici vient compléter l’équipe : le pianiste Simon Chivallon, dont le Flying Wolf avait été remarqué du côté de chez Citizen Jazz en raison de sa fougue et le batteur mélodiste, d’une incroyable justesse, Thomas Delor, qui s’est tout récemment illustré avec un Silence The 13th de toute beauté. Ajoutez quelques invités aux couleurs chaudes et vous obtenez un savant cocktail que vous dégusterez avec un plaisir non dissimulé.

Il serait criminel en effet de résister aux appels d’une musique si généreuse, portée par un collectif jamais pris en défaut de jubilation. « Nous avons créé un vrai lien et cela se ressent dans notre musique qu’on a voulu puissante, à la fois limpide et complexe, résolument actuelle, bien que prenant ses racines dans la tradition ». On ne pourra que confirmer ses propres dires à Pierre Marcus : si son jazz s’inscrit dans le courant de l’histoire de cette musique, avec un respect qui n’a rien à voir avec une démarche trop appliquée, il porte en lui ce petit supplément d’âme qui exprime la vie, corps et âme. On frémit de plaisir…