Chronique

Ivo Perelman & Matthew Shipp String Trio

Armageddon Flower

Ivo Perelman (ts), Matthew Shipp (p), Mat Maneri (alto), William Parker (b)

Label / Distribution : Tao Forms

Ils n’en sont pas à leur coup d’essai : By The Law of Music, paru chez hat ART en 1997, avait consacré le Matthew Shipp String Trio comme une formation révolutionnaire. Armageddon Flower accueille le saxophoniste ténor Ivo Perelman qui se fond sans difficulté dans le groupe de Matthew Shipp.

La collaboration de Perelman avec Shipp enrichit cette formation. Les séquences musicales gagnent en dynamisme et, si la complexité de la partition est toujours bien réelle, elle se fonde sur le renouvellement des combinaisons sonores. La conception thématique porte la musique dans de nouvelles dimensions. Quatre pièces s’inscrivent dans un discours axé sur la spiritualité, non loin des recherches modales que John Coltrane développait avec ferveur. « Pillar of Light » est imprégné d’un climat sombre où se succèdent des rebondissements harmoniques étonnants. Le collectif chemine dans une construction d’ensemble qui stimule l’intensité émotionnelle.

L’engagement de ces quatre musiciens en faveur d’une société plus juste tend à créer une musique axée sur la liberté. « Armageddon Flower », qui donne son titre à l’album, invite à se plonger dans les profondeurs de la conscience humaine. Perspicaces, les ponctuations abyssales du piano ne peuvent laisser indifférent. Matthew Shipp élabore un dialogue avec les phrases d’un Mat Maneri passé maître de l’abstraction sonore. Parallèlement, le lyrisme exacerbé d’Ivo Perelman influe sur la contrebasse ancrée au sol de William Parker. Toutes ces improvisations atteignent une dimension spectrale éblouissante.

Fortement déterminée et empreinte de spatialité, cette musique restitue bon nombre d’influences mais, avec l’expérience colossale engrangée par ces quatre instrumentistes, cela aboutit à la création d’une œuvre originale. Armageddon Flower mérite une écoute approfondie afin d’en saisir toute la richesse.

par Mario Borroni // Publié le 29 juin 2025
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