Chronique

Kaze et Ikue Mori

Crustal Movement

Ikue Mori (élec), Christian Pruvost (tp, flh), Natsuki Tamura (tp), Satoko Fujii (p), Peter Orins (dm).

Label / Distribution : Circum Disc

Crustal Movement est le septième album – le deuxième avec Ikue Mori – du désormais quintet franco-japonais Kaze. Si vous tapez le nom du groupe dans le moteur de recherche de notre site, vous constaterez qu’ils ont presque tous été chroniqués. C’est dire si cette formation issue du collectif Muzzix est appréciée à la rédaction.
Malgré plus de dix années d’existence, Kaze nous propose une musique en constante évolution. L’originalité de Crustal Movement repose sur ses procédés de conception et de réalisation.
Dans un premier temps, chacun de son côté pour Ikue Mori, Natsuki Tamura et Satoko Fujii et en binôme pour Christian Pruvost et Peter Orins, les cinq musiciens ont commencé par écrire des scénarios de pièces. Scénarios plus que compositions, parce qu’il s’agissait simplement d’organiser dans le temps et de manière non solfégique qui allait jouer et avec quelle intention. Il s’agit donc d’improvisation sous contrainte, ou pour le dire de manière plus positive, d’improvisation structurée (le lecteur choisira sa formulation suivant l’école d’improvisation à laquelle il prête allégeance).
La réalisation est tout aussi originale. Sans savoir ce que font les autres mais, grâce aux scénarios, tout de même en mesure de l’imaginer, Natsuki Tamura et Satoko Fujii enregistrent à Kobe, Ikue Mori à New-York. Les bandes du trio sont réunies et diffusées lors d’un concert à Lille pendant lequel Pruvost et Orins jouent en direct. Les deux Français sont donc les seuls à réellement entendre l’intégralité du son du groupe.
La musique qui en découle est paradoxalement très homogène et efficace. Les cinq improvisateurs se connaissant bien, ils savent d’instinct où vont se placer leurs collègues et l’on ne ressent pas l’artificialité du procédé. De plus, étant tous maîtres des techniques étendues de leurs instruments, il est parfois difficile de savoir quel musicien ou même quel instrument est en train de générer du son.
Le plan des pièces, connu de tous, empêche les temps morts, les errances de la recherche. Le discours est là. Tout de suite.